Visite au Château Rayas (18 juillet 2016)

Visite au Château Rayas 18 juillet 2016


Contrairement à mon ami le Baron, je ne suis jamais nerveux avant la visite d'un domaine. Or, cette fois fera figure d’exception. J’avais des papillons dans l’estomac à l’idée de visiter ce domaine légendaire. Imaginez, j’avais même peur d’être en retard!

Le Château des Tours




Nous avions d’abord rendez-vous au Château des Tours, la propriété d’Emmanuel Reynaud située à Vacqueyras. Ce fut d’ailleurs une excellente chose, qui nous a permis de comprendre les différences, mais surtout les points communs entre ces vins et ceux de Rayas et Fonsalette.





J’avais du mal à m’imaginer quel genre d'homme était Emmanuel Reynaud. Je constate rapidement qu’il est du type dynamique! Il nous entraine d’un pas rapide faire le tour des vignes, tout en débitant  avec enthousiasme une foule d’informations intéressantes sur ses vignes et ce qui les entoure. J’essaie de noter et prendre des photos et me retrouve souvent à faire le pas de course pour rattraper le groupe.




Le trait commun le plus important est sans doute celui de la biodiversité. Ici, comme à Rayas, les vignes sont entourées d’arbres voire de forêt, d’oliviers, de plantes variées, d’herbes aromatiques. Nul doute selon Emmanuel Reynaud que ces éléments participent à la complexité aromatique (presque unique à mon humble avis) des vins du domaine. Suite à cette visite, il me semble impossible d’en douter.





J’apprends qu’ils n'embouteillent que 20% des vignes situées en appellation Vacqueyras, le reste étant déclassé en Côtes du Rhône, puisqu’il ne le juge pas assez fin. Pour ceux qui ont goûté un « simple » Vin de pays ou un Côte du Rhône du Domaine des Tours (surtout après une très longue ouverture comme il le préconise), les termes « pas assez fins » ont de quoi faire sursauter!

Après cette marche enivrante, nous entrons dans les chais, fébriles (nous, pas les chais, d’où la virgule! ).

Blancs


Nous commençons par du blanc, d’abord la Clairette 2015 qui entre dans le Vin de pays. Celle-ci se montre très parfumée, joyeuse, florale et fumée. S’ensuit le Grenache blanc qui se montre gras, plus droit, joli. Moi qui ne suis pas le plus grand fan de blancs du Rhône, je renifle et goûte goulument, comme si c’était le verre du condamné à mort! 

Rouges

À l’aveugle. Un échantillon parfumé, super nez typé d’orange sanguine et de fraises des champs. La bouche manque toutefois de concentration. On comprend aisément tout l'intérêt d'assembler ce nectar au nez envoûtant, qui porte presque l'empreinte aromatique emblématique du domaine.

Heureusement, grâce au caractère singulier du bouquet, je déduis que c’est le cinsault, alors je n’ai pas trop l’air touriste. Ouf !

Suit le grenache du Côte du Rhône, avec son nez de fraises, une bouche super gourmande et épicée, bonne acidité. Ensuite le Grenache du Vacqueyras, super frais et gourmand, belle acidité et profondeur. Suivi d’une syrah, avec de super parfums floraux.

Une curiosité ensuite : Merlot 100%. Un nez chocolaté, mais aussi floral, avec une bouche ronde, assez élégante, épicée. C’est original et selon Emmanuel, ça donne de beaux vins de garde.


Le Château Rayas






Nous prenons ensuite la route pour nous rendre au mythique Château Rayas. Heureusement que nous suivons notre hôte en voiture, car ce n’est pas évident de trouver ce joyau perdu et il n’y a plus aucune indication du domaine depuis qu’ils habitent la propriété.

Arrivé au domaine, Emmanuel nous rappelle les quatre principales caractéristiques de Rayas : un vin fait à 100% de grenache, issu de terroirs sablonneux (sable de la mer non argileux), faisant face au nord et entourés de bois….bref un terroir froid, parmi les plus tardifs.



Il y a quatre fois plus de bois que de vignes sur la propriété. En fait, Rayas est à l'ombre dès 20h00 le soir, ce qui rafraichit les vignes, alors que celles des terroirs traditionnels continuent d’être réchauffées par la chaleur emmagasinée dans ces fameux galets roulés.

Emmanuel explique patiemment, avec humilité et une admiration palpable pour ce terroir qui l'entoure :




Jamais rien dans son discours ne laisse suggérer qu'il ait le moindre mérite dans la qualité des vins du domaine...et pourtant!


Un mot sur les deux autres terroirs du domaine.

D’abord Pignan : un Châteauneuf issu d’un terroir distinct, d’argile et de galets, plus proche du terroir traditionnel castelneuvois. Pignan contient toutefois 20-25% de vin de Rayas pour garder la finesse et l'esprit Rayas, « pour faire le lien » dit Emmanuel.

Fonsalette : propriété située à 30 km, sur la commune de Lagarde-Paréol, en appellation Côte du Rhône, achetée en 1945 par son grand-père. 15 hectares de vignes, de bois et d'oliviers, sur des sols plus classiques de région, des sables plus granuleux et plus noirs. Il faut selon lui 15 à 25 ans pour apprécier les vins de Fonsalette (!), qui sont vinifiés à Rayas.

Pialade est en quelques sortes le "troisième vin". Il provient surtout de Fonsalette, mais contient aussi tous les « restes » de Rayas ou Pignan, jugés indignes d’y figurer.



Dégustation sur cuves




Les blancs


Fonsalette blanc 2015
8% clairette 5% marsanne, tout le reste en grenache.
Très floral c'est gras et élégant, il n’y a qu’une seule cuve pour le monde entier! Introuvable et c’est dommage.

Rayas Blanc 2015
Un assemblage à parts égales de grenache et de clairette.
Au nez, c’est à la fois floral et épicé. En bouche, c'est concentré et très fin, avec déjà une superbe complexité. Un vin gras, long et… grand! 94-96+



Les rouges




D’abord les cuves de Fonsalette, qui sera composé de 35% cinsault 15% syrah, 50% grenache.

Le cinsault de Fonsalette 2015 : il compte donc pour 35 % de son assemblage. On y retrouve le même superbe nez d’orange sanguine, de fraises des champs, senti au Château des Tours.

Le grenache de Fonsalette 2015 (50% de l’assemblage): Très épicé et gourmand, avec une bonne structure, c’est délicieux.

Emmanuel nous informe que nous ne goûterons la syrah, un peu plus rustique, qu’à la fin, pour continuer sur les grenaches.

Nous goûtons donc ensuite les trois parcelles de grenache qui composeront le Rayas 2015

« Le cœur »
Un peu de kirsch fraises suave. Grande finesse, bonne puissance, fraicheur, c'est gourmand et épicé, complet.

« Le Couchant »
Plus de gras, de structure et longueur moins parfumé.

« Le Levant »
La première cueillie, le squelette du vin. Plus sérieux, austère moins mûr, orange sanguine, plus tannique.

Le Rayas 2015 sera de toute évidence un grand vin, mais on en reparlera dans plusieurs années, puisque le domaine retarde désormais les sorties de ses « nouveaux » vins. Le 2009 n’a d’ailleurs même pas encore été distribué au Québec.

Nous terminons donc la dégustation par la syrah de Fonsalette, très épicée et charnue, intéressante, mais qui n’a pas la même finesse que les autres échantillons goûtés.


S’ensuivra une rencontre au sommet pour discuter des allocations pour le Québec, pour laquelle je n’ai pas pris de notes (hihi)….


Trouvez l'erreur....






Fonsalette


Après une telle visite de plus de trois heures, nous prenons congé de notre hôte, en le remerciant pour sa générosité. Toutefois, en vrais geeks, nous nous faisons la totale en allons piqueniquer devant le Château de Fonsalette, à Lagarde-Paréol. Le nom du domaine n’est pas indiqué mais nous le retrouvons grâce aux indications données par Emmanuel.







Je garderai longtemps en mémoire cette journée et cette visite qui consacrait la réalisation d’un rêve.

Merci Monsieur Reynaud, vous êtes un gentleman doublé d'un vigneron talentueux, à l'écoute d'un terroir d'exception.

Pierre Beauregard a écrit:Superbe compte-rendu Yves !

Le "1er Grand Cru" est apparu sur quel(s) millésime(s) et pourquoi ?  Parce qu'à l'aveugle on le confond souvent avec un bourgogne ??

Je trainais derrière pour la photo et j'ai oublié de poser cette question. Je vais tenter de savoir.

Michel Therrien a écrit:Un grand merci Yves.
Visite complète et un CR qui fait vibrer même un bourguignol!

Deux questions rapides.

À part le Château Rayas 2015.....quels autres millésimes avez-vous dégustés?

Avez-vous parlé de l'air nécessaire ou temps d'ouverture?

Comme c'est de coutume selon mes lectures, les visiteurs qui dégustent (pas très nombreux semble-t-il) goûtent strictement le millésime en cours d'élevage, jamais de vins en bouteille. 

Quant au temps d'ouverture, ce sujet avait été largement couvert avec Emmanuel R. l'an dernier, je n'ai donc pas cru bon d'y revenir. Je me contentais donc d'absorber le plus possible, goûtant et écrivant. Tu aurais trouvé ça éprouvant d'écouter ainsi...  


   

PhilippeGingras a écrit:Le rêve !
Est-ce facile à visiter C9P en général pour les domains ?

Philippe, en général, très facile, mais Rayas est l'une des rares exceptions.

Très sympathique cette entrevue, merci Stéphanie!

Un bel article du Monde:

http://www.lemonde.fr/vins/article/2017/12/15/chateau-rayas-grand-vin-secret_5230523_3527806.html